lundi 2 septembre 2013

La nostalgie heureuse d' Amélie Nothomb,

Voilà enfin entamée ma rentrée littéraire, avec bonheur, sourire attendri aux lèvres et indulgence au cœur comme toujours avec le dernier ouvrage d’Amélie Nothomb.  Je ne résiste pas, c’est le premier achat en librairie que je m’accorde d’emblée, sans même avoir lu les critiques à son sujet. Ce livre, je le veux  tout neuf, tout beau, tout propre, immaculé, comme un nouveau pays à découvrir et je le lis d’une traite mais le plus lentement possible, car c’est encore une fois  mon seul reproche : trop court, c’est toujours trop court!
Cette fois, c’est  d’un voyage souvenir au Japon à l’occasion d’un reportage dont il s’agit . Elle y retourne après bien des années et y retrouve entre autres les deux êtres les plus marquants de ses séjours là-bas: son amoureux et sa très chère nourrice, Nishio-san, sa deuxième mère, seule et âgée désormais, et c’est un passage très réussi à l’émotion intense mais comme toujours, très maîtrisée.  N’empêche la larme à l’œil n’est pas loin quand elles se séparent définitivement cette fois, elles le savent bien:
    Nishio-san se raidit. Elle salue poliment les gens de l’équipe qui sortent tous, me laissant seule dans l’appartement avec la femme cruciale. Alors elle devient convulsive, me prend les poignets puis m’étreint, puis me reprend les poignets. Ses yeux tragiques parlent une langue insoutenable.
Il y a une heure, je pensais que les retrouvailles, ce devrait être interdit. A présent, je pense que les séparations devraient l’être également. Je suis en train de transgresser ces deux tabous concomitants à une heure d’intervalle. Ma seule excuse, c’est que j’en ignorais l’essence tragique.Nishio-san et moi tremblons comme des réacteurs. Elle dit qu’elle a honte, je dis que j’ai honte. Je me surprends à penser  que je voudrais ne plus être ici. Il y a trop de souffrance. Je voudrais que l’arrachement soit accompli. A cinq ans, j’étais plus forte.
Une ultime fois j’étreins la femme sacrée.
L’autre belle rencontre, plus légère celle-là, pleine de crainte et d’humour, c’ est celle de Rinri, le fiancé abandonné de ses vingt ans. 
Après une crainte panique d’être en retard au rendez-vous, puis de ne pas le reconnaître, enfin de ne pas  être en état de rencontrer (…) le premier garçon qui m’a donné confiance en moi, les retrouvailles sont idylliques et douces. Marié, avec enfants et à la tête d’une entreprise florissante, Rinri est un homme heureux et le dîner, une réussite – indicible mais Amélie est si troublée qu’elle en perd le nom de son poète préféré.
 J’ai aimé aussi le portrait de sa traductrice:  l’admirable Corinne Quentin, l’interprète français-japonais la plus connue de Tokyo ... qui déborde d’enthousiasme et lui apprend le vrai sens du mot nostalgie au Japon:   l’instant où le beau souvenir revient à la mémoire et l’emplit de douceur.
 A la question de savoir si la madeleine de Proust est nostalgique ou natsukashii, elle penche pour la deuxième option. Proust est un auteur nippon. 
J'ai aimé bien d'autres passages encore: la  visite à son école,  celle aux cerisiers en fleurs,  le survol de l'Himalaya et toujours cet humour à ses dépens car elle ne s'aime pas, Amélie,  elle voudrait être une autre. 
C'est d'autant plus terrible que je cherche toujours à bien me conduire. Je ne suis pas quelqu'un qui se laisse aller ou qui s'en fiche.
Mais la voici dans le taxi, à Tokyo, en route vers son rendez-vous  avec Rinri:
Sur la banquette arrière, il transporte une Occidentale aux yeux écarquillés qui ressemble à un volatile hypertendu et cela ne l'affecte pas le moins du monde.
Allons, ma rentrée ne  commence pas si mal! 
 Challenge Rentrée littéraire 2013, n°1

D'autres avis :  Ici,  Là,  (argali),  et là , (Hérisson),  et puis Cynthia, enfin une interview,

15 commentaires:

  1. D'Amélie, je ne lis que les récits autobiographiques, donc celui-ci est pour moi. J'avais vu le reportage et j'avais aimé.

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    1. J'aimerais bien maintenant voir le reportage aussi. Je vais voir si on le trouve encore!

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  2. PS. En plus, j'apprends qu'Amélie est programmée dans ma librairie en décembre !

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    1. Quelle chance! J'espère que tu iras lui poser quelques questions comme sur son livre en cours par exemple puisqu'elle écrit tous les jours sans exception, selon ce qu'elle dit toujours.

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  3. Pas moyen que je relise Amélie un jour. Je crois que je suis allergique...

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    1. Pourtant celui-ci est peut-être parmi les plus sincères et abordables pour un allergique comme toi. Je l'ai trouvé drôle et émouvant à la fois.

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  4. Billet publié le même jour :) Du coup j'ai ajouté ton lien dans mon billet.
    Je me suis demandée ce qui empËchait l'auteure de retourner de temps en temps au Japon voir Nishiosan. Mais à l'entendre, on dirait qu'elle a fait ses adieux au Japon non ?

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    1. Oui, on dirait, mais sait-on jamais si elle n'y retournera pas encore une fois. C'est vraiment le pays de son cœur et puis elle est tellement fantasque que je ne dirai jamais à son sujet! J'ai mis ton lien également.

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  5. Chère madame, vous voici nominée une fois de plus aux Versatiles Blogueurs Awards.... ^^

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  6. Un nouveau Nothomb ? Quelque chose me dit que c'est la rentrée....

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  7. De beaux moments et pour moi une découverte de son histoire personnelle!

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  8. Je suis comme toi, le premier livre de la rentrée que j'achète est celui d'Amélie, je ne me pose pas de questions. Je ne l'ai pas encore lu, j'attends d'être bien tranquille pour deux heures divines, car quand je pénètre entre ses lignes, je n'en sors plus !

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    1. plus qu'entre les lignes, tu seras dans le taxi avec elle, tu seras chez Nishio san avec elle, tu seras avec Rinri, tu seras le voyeur comblé et tu voudras que cette Nostalgie heureuse dure plus longtemps.....merci Amélie jolie

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